Certaines n'avaient jamais vu la mer sont ces femmes japonaises, le plus souvent d'origine modeste qui au début du 20ème siècle ont quitté le Japon pour s'installer en Amérique.
Elles embarquent donc très jeunes pour rejoindre un futur époux lui aussi japonais uniquement vu en photographie pour vivre, croient-elles, une existence heureuse dans ce nouvel eldorado : "Nous voilà en Amérique, nous dirions-nous, il n'y a pas à s'inquiéter. Et nous aurions tort."
Par une écriture à la fois sensible et acérée, Julie Otsuka porte douloureusement témoignage de celles trahies par un époux qui n'est pas ce qu'il prétendait être, contraintes de travailler durement dans les champs ou domestiques ayant à subir le racisme des familles blanches.
L'utilisation répétitive du "nous" est la voix collective de toutes ces femmes aux parcours multiples mais au devenir semblable. Leur vie est en suspens comme le démontre l'emploi du conditionnel "Quand nous aurions mis de côté assez d'argent pour aider nos parents à mener une vie plus confortable, nous retournerions au Japon.... Nos mères seraient assises auprès du puit... "Ma petite fille, nous diraient-elles, où donc étais-tu passée ?".
Ces femmes devenues mères à leur tour voient le dernier lien qui les rattache au Japon s'effondrer quand leurs enfants rejetteront les rites ancestraux pour vivre pleinement à la mode américaine et "surtout ils avaient honte de nous". La guerre scellera leur oubli.
Si vous avez aimé ce roman très singulier, n'hésitez pas à découvrir le premier ouvrage de Julie Otsuka Quand l'empereur était un Dieu. Ce roman, comme Certaines n'avaient jamais vu la mer, rend vie aux immigrants japonais et leurs descendances qui font partie intégrante de l'histoire des Etats-Unis.
Zakuro
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